Dessin : Errol Flynn
Je souhaitais dessiner cet acteur depuis longtemps mais je cherchais la photo qui me parlerait; et lorsque je suis tombée sur cette image d’Errol Flynn, j’ai su que je devais commencer à cet endroit. La mer, l’aventure, le charme… Cela le représente bien. La photo devait dater du début des années 1940, ce qui signifie qu’il devait se trouver sur son yacht le Sirocco, son havre de paix du moment.
Ce portrait fut plutôt difficile à réaliser. Il repose entièrement sur l’expression faciale, les épaules et les pantalons de l’acteur; l’arrière-plan quasi inexistant et la lumière naturelle ne me donnaient qu’assez peu de marge de manœuvre, mais je suis très heureuse du résultat final. C’est un instantané de vie, bien loin des poses recherchées des photos de studio.
On connait bien sûr cet acteur sous les angles du grand buveur et du playboy célèbre, mais on découvre qu’il a aussi été bien plus que cela lorsqu’on s’attarde à son histoire. Un grand désir de comprendre le monde l’animait et il cherchait constamment à s’améliorer afin de goûter le plus possible à celui-ci : il admettait lui-même travailler fort à découvrir un sens à la vie. Malheureusement, une tendance à se mettre dans le pétrin, une grande impulsivité et d’innombrables dépendances ont empêché Flynn de connaitre un quelconque sentiment d’apaisement – ou devrais-je dire, de contentement – avant les dernières années de sa trop courte existence. Une vie d’acteur, pour celui qui aurait préféré se voir accepté comme écrivain (suite à deux romans, Beam Ends et Showdown) ; d’ailleurs, son échec dans ce domaine – son plus grand rêve – l’affecta beaucoup.
J’ai lu son excellente autobiographie My Wicked, Wicked Ways (1959) il y a quelques mois, un livre bourré d’histoires et d’exagérations – car Flynn est un conteur – mais aussi plein de vraies et intimes réflexions.
Depuis cette lecture, je me demande si quelqu’un aurait pu devenir l’étoile Polaire d’Errol Flynn : quelqu’un pour l’empêcher d’aller à la dérive; quelqu’un pour l’aider à retrouver le Nord dans les périodes difficiles mais surtout, dans les moments de trop grande facilité. L’intelligence, le courage et l’énergie ne manquaient pas à Flynn; il aurait toutefois bénéficié de l’influence d’une personne disciplinée et pleine de bon sens pour le ramener à l’ordre de temps en temps. Cette personne aurait pu être sa comparse et actrice Olivia de Havilland. Ceci dit, le bon sens de cette dernière l’a incité à s’éloigner de l’acteur – enamouré, bien sûr – mais aussi déjà marié et très malheureux de l’être. Je prévois éventuellement les dessiner les deux ensemble, question de les réunir définitivement; à quoi peut bien servir l’art si ce n’est pour créer des fins heureuses comme celle-ci?
D’ici-là, j’apprécierai cette vision du Tasmanian Devil sur son bateau.